Les oiseaux de mer améliorent la productivité et le fonctionnement des récifs coralliens en l'absence de rats invasifs

Abstract

La connectivité biotique entre les écosystèmes peut assurer un transport important de matière organique et de nutriments, influençant ainsi la structure et la productivité des écosystèmes, mais ses implications sont mal comprises en raison des perturbations humaines des flux naturels. Lorsqu'ils sont abondants, les oiseaux de mer qui se nourrissent en haute mer transportent de grandes quantités de nutriments sur les îles, améliorant ainsi la productivité de la faune et de la flore insulaires. On ne sait pas si le lessivage de ces nutriments vers la mer influence la productivité, la structure et le fonctionnement des écosystèmes de récifs coralliens adjacents. Nous abordons ici cette question en utilisant une expérience naturelle rare dans l'archipel des Chagos, dans lequel certaines îles sont infestées de rats et d'autres sont exemptes de rats. Nous avons constaté que les densités d'oiseaux de mer et les taux de dépôt d'azote sont respectivement 760 et 251 fois plus élevés sur les îles où l'homme n'a pas introduit de rats. Par conséquent, les îles sans rats ont des valeurs d'isotopes stables de l'azote (?15N) beaucoup plus élevées dans les sols et les arbustes, reflétant les sources de nutriments pélagiques. Ces valeurs plus élevées de ?15N étaient également apparentes dans les macroalgues, les éponges filtrantes, les algues gazonnantes et les poissons des récifs coralliens adjacents. Les poissons-demoiselles herbivores des récifs adjacents aux îles sans rats se sont développés plus rapidement, et les communautés de poissons avaient une biomasse plus élevée dans tous les groupes trophiques d'alimentation, avec une biomasse globale supérieure de 48 %. Les taux de deux fonctions critiques de l'écosystème, le broutage et la bioérosion, étaient respectivement 3,2 et 3,8 fois plus élevés à proximité des îles sans rats. Collectivement, ces résultats révèlent comment les introductions de rats perturbent les flux de nutriments entre les écosystèmes pélagiques, insulaires et de récifs coralliens. Ainsi, l'éradication des rats sur les îles océaniques devrait être une priorité de conservation élevée car elle est susceptible de bénéficier aux écosystèmes terrestres et d'améliorer la productivité et le fonctionnement des récifs coralliens en rétablissant les subventions nutritives dérivées des oiseaux de mer dans de vastes zones océaniques.